Indiscretions et mutineries

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janvier 9, 2013
par myel
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Dalí ou l’inconscience

Salvador-Dali-Little-Cinders-Cenicitas-1927-28J’ai rencontré le monde de Dalí à douze ans, dans son berceau, Figueres. C’est une journée gravée dans les quelques dizaines qui marquent une vie : je me souviens encore du débardeur kiabi bleu-jean que je portais, c’était sortie de classe, un arrêt court sur le retour de Barcelone et la première fois qu’un garçon assis à une terrasse tentait une dragouille jusqu’à savoir mon âge (les seins anachroniques, hommage). Sauf qu’il en avait vingt et que les copines autour ont dit “viens allez on se casse il commence à bander dans son jean”. Je crois que c’était vrai mais j’en savais trop rien. Innocence, inconscience.

Revenons à Dalí. J’ai le souvenir vague de ce château complètement dingue, avec surtout les sensations, d’un rêve, de chocs, de l’étendue créative devenue possible. Je ne me rappelle pas les toiles mais des couloirs blancs et des crayonnés, du canapé avec ses lèvres rouges. L’ensemble du voyage portait brin de folie pour adolescente débutante : plongeon dans Barcelone, face à face avec les extravagances de Gaudí, et Dalí donc, en point d’exclamation final.

Je n’ai pas su me défaire de la ville, Barcelone, au point d’y retourner trois fois en
core. Gaudí reste fascinant. Et j’ai revu Dalí à Barcelone même (Poble Espanyol), à Madrid et… à Paris hier. Tant de divagations pour atterrir au Centre Pompidou, où l’affluence de cette grande exposition n’était (heureusement) pas siii folle qu’annoncé. De toute façon pour tenir dans la file j’avais prévu l’amie Kobo, et l’histoire des sorcières dans laquelle je suis enrobée.

Je suis perplexe à l’idée d’avoir un avis sur ce que j’ai pu observer. Il n’y avait plus autant d’étonnement. Il y avait les gens qui se passaient devant, et entre les tableaux. Il y a le personnage de l’artiste que j’avais toujours occulté dans mon attachement aux images. Des références en tas, de la cérébralisation qui n’avait dans mes yeux d’ex-ado rien à s’incruster là. Alors que si, dans le monde des adultes, on calcule, on analyse, on conteste, contexte, on se divise et se psychanalyse… Ah c’est intéressant, bien sûr, de connaître la guerre, les tendances, les mythologies les symboles. Mais que fait-on de l’innocence ? De l’inconscience ?

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L’intérêt à mes yeux de côtoyer ces étrangetés, c’est d’y découvrir le visage de sa propre folie. D’apprécier la manière de traiter la lumière dans les compositions, la force des couleurs éveillant la sensibilité pour lire dans les signes les lignes d’un monde allégorique né d’une interprétation personnelle, unique.

C’était un peu chargé, cet après-midi de janvier, pour vivre une telle expérience. Le temps compté bien que large, l’agitation autour, l’audioguide à la main… Je me suis cultivée, j’ai nourri ma curiosité, mais je n’ai pas senti ni le vent de délire du printemps 2001, ni l’attardement de l’aube de l’été dernier à m’interrompre un long instant devant / derrière sa soeur à la fenêtre ouverte dans la salle quasi vide de la Reina SofiaUne fenêtre, dans un mur : idée si simple, innocente et si source d’évasions inconscientes au possible…

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janvier 6, 2013
par myel
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Le pire c’est tout ce qui s’échappe

Il y a tout ce qui s’éveille au moment de dormir, ces mots en cascades jaillissant, ces scènes bancales, ces vers et ces rythmes qui m’hypnotisent et me conduisent au terme d’un périple plus ou moins durable aux vrais rêves. Il y a la frustration de les savoir fragiles, de les perdre avec le sommeil, de n’être jamais sûre de renouer le fil au lit du lendemain.

Il y a tout ce qui passe en un éclair au coeur de la journée, pas au moment propice mais en lisant par exemple : l’esprit divague et colle sur un paragraphe une nouvelle histoire, avant de reprendre conscience et quelques lignes plus haut que là où se glissaient mes yeux.

Il y a tout ce qui se vit, et tout n’est pas écrit. Parce qu’il serait malvenu d’étaler trop de sentiments privés, alors on choisit le niveau d’opacité à donner aux mots qui s’impriment. Ou plutôt je ne choisis pas, il y a la page blanche et les mots qui s’installent où bon leur semble ; premier jet, souvent relu, rarement retouché. Tout se transforme en poésie et on oublie les faits, exprès.

Dans tout ceci, ce que je préfère ce sont les cohérences qui se dessinent inconsciemment, qu’on révèle en grattant à peine la surface où les mots se font écho. Comme là écho et cohérence, se répondant sans l’avoir demandé. C’est pas juste joli, les jeux dessinent des labyrinthes de signes aux multiples sorties.

Dans tout ceci, ce qui m’angoisse le plus, c’est tout ce que je n’écris pas, que les ellipses soient choisies ou pas. Je connais bien trop l’inquiétude de la mémoire, ce qui s’oublie trop vite, et ce qu’on enveloppe d’un brouillard pour l’y perdre. Les sottises, les secrets, les colères, les rêveries… Toutes ces possibilités qui s’échappent. Qui s’effacent comme des empreintes sur la neige, avant même qu’elle ne soit tombée.

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janvier 4, 2013
par myel
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Les bribes de décembre #3

24 décembre 7:58

Le jour se lève et mes rails vont vers l’est. Le ciel se teint de rose et j’ai l’esprit pastel, noyé dans des mots à venir. Et relisant des mots passés. J’ajoute à ma future bibliothèque numérique plus de livres que je n’en lirai dans ma vie. Et je retombe sur mes vieux pdf d’adolescente : Oser les dragons, L’automne. Poèmes de quatorze à seize ans, première histoire d’amour façon journal, 2004, si loin. Je les feuillette avec lassitude, j’en extrais quelques lignes pour la suite, je les referme sans bien savoir qu’en faire.

Le jour se lève à la fenêtre de l’horizon, ce soir c’est réveillon.
J’ai dormi trois heures et des miettes, l’assoupissement me guette.

janvier 4, 2013
par myel
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Happy (crazy) new year !

J’ai pas envie de regarder derrière, 2012 a été l’année du rien ou tout : beaucoup de piétinement, et des pieds dans les plats. L’essentiel est enregistré, empaqueté, ficelé comme un colis piégé.

Cette année tout ce que je souhaite, c’est avancer.

animation

décembre 24, 2012
par myel
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Automotisme #7

La brouille est dans nos gènes. On se tourne, se foudroie, se trompe et s’échappera.

L’instabilité reine. Je multiplie les droits, de se connaître, de se valser, de s’égosiller. De se briser sur la voie.

Vous me faîtes des avances, je rembobine, je freine. Comment vous échapper encore cette fois ? On s’autorise, s’embrase, s’entrelace et après ? N’est-on pas programmés pour au matin parvenu s’oublier ? C’est bien ce qu’on verra quand on se réveillera.

décembre 18, 2012
par myel
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Les bribes de décembre #2

valerie-kasinski-busJ’ai à peine senti le départ, sans être assoupie ce lundi. Juste qu’on était dans une gare souterraine, et que sous perfusion je m’habituais aux nouveaux titres de samedi dernier. Petite voix n°1 s’exprima en premier : “On est encore dans un tunnel depuis plusieurs minutes ?”. Petite voix n°2 se dit moins naïve : “Oui c’est ça, un tunnel… on l’appelle la nuit et il dure longtemps ces temps-ci”.

Et il y fait bien frais, enfinle tgv semble climatisé : de l’air gelé s’échappe de la ventilation. Lille Avignon ? Non Paris-Nord. Normal. J’hésite à remettre mon chapeau, et me tenir en boule jusque l’arrivée.

Avant la gare j’étais dans un brouillard humide, une installation Fantastic j’ai supposé, comme la maison renversée croisée ce midi, les yeux éblouis par un soleil froid.J’ai déjeuné autour de mon ancienne grande école, sans l’ombre d’un brin de nostalgie. Étonnant quand on connait mes penchants pour ces types de sentiments-là. Rassurant, je n’ai pas de mélancolie pour l’ensemble du passé, bien que je m’en doutais déjà, vu les années rayées en bouillie de l’esprit… Rassurant de ne rien rien ressentir…? Angoissant tout autant.

Avec mes collants roses qui détournent l’attention, j’ai trimbalé mon sac d’une tonne sur les pavés, dans les galeries, une partie de l’après-midi. Attendant l’heure du train ; attendant le hasard, je l’ai croisé deux fois. A dénicher un vieil EP d’Eiffel, 1999 L’affaire. Quatre euros, l’affaire. Et à capter une voix familière apostrophant mon dos, après une succession de choix “je vais ici ou là?”, la probabilité de rencontrer quelqu’un, au même endroit, au même moment, est suffisamment faible pour être relevable.

Ça reste une journée froide, à cause de la clim’ qui poursuit. Alors que du treize je suis libérée : une occurrence hier, une autre ce midi, mais dans le TGV je suis sans voisin place 22. J’aime mieux, 22. Ça reste une journée froide car je n’ai pas trouvé, de gants rouges à mon goût, ni de surprises de Noël au décompte qui se réduit.

Noël comme une fillette c’était hier, au Zénith. Les gradins chargés de gamins, et nous et nous et nous, pour un cirque étonnant, mêlant des tubes (il parait) chantés par l’animateur en chef-karaoké, à des numéros les plus traditionnels comme les chevaux qui trottent ou le traîneau du Père Noël qui défile au final. J’y allais pour les tigres, les lionnes, les acrobates et la magie. Et puis c’était gratuit. Mission fillette accomplie.

On a souri en remarquant, avec tous ces enfants : ce que j’aime chez les gens c’est qu’ils soient désarticulés, les gestes souples, qu’ils se mettent à tourner. En général ça s’arrête vers sept ans. Quand on prend conscience d’être regardé, de devoir se tenir, bien se conduire. Ce que j’aime chez les gens c’est quand il persiste une part de ce vacillement, l’imminence d’un vertige, d’un faux pas spontané.

Il reste vingt-deux minutes pour me tenir en boule sur ma place vingt-deux. Paris je rentre. Fermons les yeux. Prochain train pour le réveillon.